mercredi 30 septembre 2015

Montre moi un héros


Mini-série américaine créée par David Simon (le showrunner de The Wire et Treme) et réalisée par Paul Haggis. Elle a été diffusée par l’incontournable HBO (Sopranos, Six feet under, Game of thrones…), et est adaptée du livre éponyme de Lisa Belkin, ancienne journaliste au New York Times.

Le pitch

La série se déroule dans la ville de Yonkers, dans la banlieue de New York, et décrit la forte résistance de la classe moyenne blanche face à l'installation d'habitations à loyer modéré dans leur voisinage direct, ordonné par la justice américaine. Qu'ils soient maire, conseiller municipal ou simple citoyen, on suit le parcours de plusieurs habitants, leurs prises de position pour ou contre ces « projects » (nom donné aux habitations à loyer modéré aux États-Unis) et l'impact que cela a sur leur vie. La série, qui a un déroulement chronologique, se passe entre 1987 et 1994.


Oncle Erneste : Dis donc, tu te foules de moins en moins, ça vient de Wikipedia ton résumé, je l’ai retrouvé.

Sol : Eh bien, disons que j’ai métier qui me prend beaucoup de temps et par conséquent, je ne peux tout rédiger moi-même.

O.E. : tu es bibliothécaire fiston…

S. : oui et alors ?

O.E. : tu vas pas me faire croire qu’entre ranger ta pile de livres et boire un café, tu n’as pas le temps d’écrire un truc correct ?!

S. : ah, ça y est, tout de suite les clichés. Bientôt tu vas me dire que je porte un chignon non ?

O.E. : ça t’irait bien.

S. : Bon, reprenons. Pourquoi j’ai aimé cette série ?

O.E. : parce que le héros est moustachu ?

S. : je ne vois pas le rapport.


O.E. : tu travailles qu’avec des femmes, tu dois être homo, comme les coiffeurs. Oh ça va je déconne. Le héros est moustachu, ce n’est pas un détail. Je te prédis que dans quelques années, après la barbe, ce sera la moustache qui revient à la mode. Y’a pas de raisons que les indiens et les turcs soient les seuls à porter les favoris.

S. : Hum, tu te surpasses là tonton. Je vais faire comme si je n’avais rien écouter.

O.E. : c’est imparable.


S. : J’ai aimé cette série car, à l’instar de The Wire et Treme (qui font partie de mon top 10), la série s’attache à une galerie de personnages, totalement incarnés. Nous sommes ainsi, spectateurs, mis à contribution : chaque point de vue doit être analysé pour appréhendé ce que les américains appellent « the big picture ».

Oscar Isaac est comme d’habitude brillantissime, mais ce n’est pas le héros que l’on pourrait croire. C’est un héros ordinaire, presque involontaire. Et la société, la multitude est plus forte que l’individu. On voit aussi le côté négatif de cela : des individus fermés, isolés vont se grouper et trouver leur force décuplée. Jusqu’à les aveugler. Ceux qui sont contre l’implantation de logements sociaux dans les quartiers blancs favorisés vont aller jusqu’à la violence physique pour exprimer leur mécontentement.



C’est justement en cela  que David Simon excelle. Au lieu de tomber dans le manichéisme (les pro et les anti-projects) il donne une voix à un personnage exceptionnel : catherine keener incarne une militante farouche contre la construction des logements à loyers modérés. Peu à peu, elle va comprendre les intentions cachées derrière ce mouvement…

Je n’en dis pas plus pour ne rien dévoiler. Le maire Wasiscko en est également la preuve. Il prend partie pour les opposants aux logements lorsqu’il s’agit de se faire élire puis se retrouve en position de défenseur du projet. Ainsi, David Simon n’oppose jamais deux camps frontalement, il donne à voir la complexité des trajectoires de chaque individu, pris dans son environnement qui l’influencera inéluctablement.


Si l’action se déroule dans les années 80, cette série très documentée fait  écho à des problèmes très contemporains. On pense évidemment aux violences policières sur les noirs aux Etats-Unis, mais également, plus près de chez nous, au débat sur le logement et sur la mixité sociale. Pourquoi est-ce si important ? Comment la mettre en œuvre ? Comment accepter l’autre, apprendre à le connaître ? Faut-il continuer, sur le modèle multiculturel anglo-saxon, à ghettoiser les populations défavorisées ou plutôt, en langage politiquement correct, à faire en sorte que les communautés cohabitent, mais bien séparées les unes des autres ? Comment éviter la gentrification ? 

Toutes ces questions sont posées, et c’est bien là la force de cette entreprise : créer une fiction divertissante qui donne au spectateur à penser.





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